Introduction
L’irruption de l’intelligence artificielle générative bouleverse le monde de l’image. En quelques secondes et à partir d’une simple description textuelle, des outils comme Midjourney, DALL·E ou Adobe Firefly peuvent créer des visuels d’un réalisme étonnant. En 2022-2023, ces technologies ont gagné en qualité au point de rendre parfois difficile la distinction entre une image générée par IA et une photographie réelle . Face à cette révolution, le milieu de la photographie traditionnelle s’interroge : menace existentielle pour les photographes ou nouvelle palette d’outils créatifs ? Dans cet article long format, nous explorerons l’impact de l’IA générative sur la photographie avec une perspective internationale, en croisant les points de vue de photographes professionnels, d’artistes, d’experts en IA, d’agences créatives et de clients. Nous analyserons des exemples concrets et récents (projets innovants, usages commerciaux, polémiques), ainsi que les implications sur le métier de photographe (compétences requises, modèle économique, perception du public). Nous mettrons en lumière les craintes et opportunités qui émergent, et comparerons objectivement l’IA et la photographie humaine. Enfin, nous ouvrirons sur les pratiques hybrides mêlant IA et photo, avant de conclure avec le point de vue de ChatGPT sur l’avenir de la photographie à l’ère de l’IA.
Au sommaire :
L’essor de l’IA générative dans la photographie visuelle
En l’espace de deux ans, l’IA générative est passée du stade d’expérimentations en labo à celui d’outil grand public bouleversant la création visuelle. 2023 a marqué une adoption généralisée de l’IA dans l’image, avec des avancées spectaculaires en photoréalisme . Des modèles de dernière génération comme DALL-E 3, Midjourney V5/V6 ou Google Imagen 2 produisent désormais des images d’une qualité telle qu’il devient parfois difficile de distinguer une création IA d’une photo traditionnelle . Un exemple frappant a été l’image virale du Pape François en doudoune blanche fin mars 2023 : cette photo fictive générée via Midjourney a trompé de nombreux internautes qui l’ont prise pour un véritable cliché paparazzi. Le photoréalisme n’est plus l’apanage exclusif des caméras.
En parallèle, l’accès à ces générateurs s’est largement démocratisé. Alors qu’il fallait une invitation pour tester DALL·E au début, on dispose désormais d’applications mobiles et de services web faciles d’utilisation pour créer des images par IA . Les grands acteurs du secteur ont embrassé la tendance : Adobe a lancé Firefly en 2023, une IA d’image intégrée directement à Photoshop , tandis que les banques d’images Getty Images et Shutterstock ont intégré des outils texte->image dans leurs plateformes . En d’autres termes, l’IA générative est devenue inévitable dans l’écosystème visuel contemporain .
Les chiffres témoignent de cet engouement mondial. Par exemple, la communauté Midjourney, accessible via Discord, a atteint 14,5 millions de membres en 2023 . Sur Google, le terme “Midjourney” est même devenu plus recherché que “Stable Diffusion” ou “DALL·E”, signant la popularité de cet outil auprès du grand public . Cette explosion d’intérêt s’explique autant par la curiosité des créatifs que par la médiatisation des prouesses (et dérapages) de l’IA.
De plus en plus de secteurs expérimentent ces IA génératives pour la production visuelle. En publicité et e-commerce, elles offrent la promesse de visuels originaux sans passer par un coûteux shooting. Des entreprises comme Amazon ou Levi’s ont commencé à tester l’IA pour présenter leurs produits sous un nouveau jour . Dans la photographie de mode, Vogue Italia ou Glamour (édition Bulgarie) ont réalisé en 2023 des éditoriaux mêlant prises de vue réelles et décors générés par IA . Cette collaboration inédite entre photographes et IA a produit des images saisissantes, même si l’accueil du public et des professionnels a parfois été mitigé .
Enfin, l’IA s’est invitée dans les concours de photographie, suscitant des débats de définition. Le cas du photographe allemand Boris Eldagsen a fait grand bruit : son œuvre générée par IA a remporté le premier prix d’un prestigieux concours (Sony World Photography Awards 2023), avant qu’il ne révèle la supercherie. Eldagsen a refusé le prix, affirmant que « l’IA n’est pas de la photographie. Je ne peux donc pas accepter ce prix » . Cette « expérience » a mis en lumière le vide juridique et conceptuel autour de ces images d’un nouveau genre, poussant les organisateurs à envisager des catégories séparées pour l’IA . En somme, l’année 2023 a ancré l’IA générative au cœur de la création visuelle tout en posant les premières grandes questions éthiques et identitaires pour la photographie.

Photographes face à l’IA : craintes et controverses
L’émergence de l’IA générative a provoqué de vives inquiétudes chez de nombreux photographes professionnels. L’idée qu’un algorithme puisse produire en quelques secondes l’équivalent d’une photo travaillée longtemps en studio ou patiemment capturée sur le terrain est dérangeante. Certains y voient une menace directe pour leur métier. « Est-ce que cette application rend les photographes superflus ? », s’interroge un blog spécialisé, rappelant que lorsque la photographie est apparue au XIXᵉ siècle, les peintres ont eu peur – sans que la peinture ne disparaisse pour autant . La comparaison se répète aujourd’hui : la photographie a-t-elle à son tour trouvé plus fort qu’elle ?
La première crainte, très concrète, concerne l’emploi et les revenus des photographes. Pour certains types d’images, les clients pourraient être tentés de se passer de photographe et de générer directement l’illustration souhaitée via une IA. PetaPixel rapporte ainsi que l’IA a déjà commencé à faire du tort aux photographes, car « certaines images sont désormais bien moins chères et plus rapides à produire artificiellement qu’en engageant un humain en chair et en os » . Dans les régions où les budgets sont serrés, l’impact se fait sentir : « En Amérique latine, par exemple, les photographes publicitaires et éditoriaux sont de moins en moins sollicités par les marques, et ils perdent peu à peu du terrain, du travail et des revenus » . Cette phrase choc d’un rapport de l’agence Circus Grey pour Nikon Pérou résume une angoisse partagée mondialement. Lorsque Nikon (fabricant d’appareils photo) lance en 2023 une campagne publicitaire pour vanter la “Natural Intelligence”, le message est clair : « Cette obsession de l’artificiel nous fait oublier que notre monde est rempli de lieux naturels étonnants qui sont souvent plus étranges que la fiction » . Autrement dit, ne laissons pas l’IA nous faire négliger la beauté du réel, ni ceux qui la capturent.
Au-delà de la peur de perdre des contrats, les photographes soulèvent d’importantes questions d’éthique et de droit. Les IA d’image sont entraînées sur des milliards de photos trouvées en ligne, souvent sans le consentement des auteurs. Les organisations professionnelles s’alarment de ce pillage des œuvres : en France, l’Union des Photographes Professionnels (UPP) a publié en 2023 un communiqué appelant à encadrer légalement l’usage des IA génératives afin d’adapter la réglementation sur le consentement et la rémunération des auteurs dont les œuvres servent à entraîner les systèmes . En l’état actuel, un artiste photographe peut voir son style « appris » et imité par une IA sans toucher un centime, tandis que l’entreprise qui fournit le modèle IA, elle, commercialise des abonnements lucratifs. Ce déséquilibre nourrit un sentiment d’injustice et de violation du droit d’auteur. D’ailleurs, plusieurs procédures judiciaires ont émergé : aux États-Unis, Getty Images a poursuivi Stability AI (créateur de Stable Diffusion) pour utilisation illégale de son catalogue d’images protégées . Ces batailles juridiques en cours illustrent la nécessité de clarifier ce qui est permis ou non, aussi bien pour la protection des photographes que pour celle des créateurs d’IA.

Parallèlement, l’authenticité même des images devient un sujet de controverse. Si n’importe qui peut générer de faux clichés plus vrais que nature, comment faire confiance aux photos circulant en ligne ou dans les médias ? Des photomontages hyperréalistes créés par IA ont déjà provoqué des désinformations ponctuelles (par exemple, de fausses images d’actualité partagées sur les réseaux sociaux). Les concours de photographie, on l’a vu, ont été pris de court par des œuvres IA se faisant passer pour des photos. Cela amène une confusion sur la définition : qu’est-ce qu’une photographie à l’ère de l’IA ? Boris Eldagsen, par son coup d’éclat, a précisément voulu « ouvrir le dialogue sur ce que nous voulons considérer comme de la photographie et ce que nous n’accepterons pas », questionnant si le « parapluie de la photographie » devait s’élargir pour inclure les images IA ou non . La plupart des photographes traditionnels penchent pour une démarcation nette : une image 100% générée par IA ne devrait pas être assimilée à de la photographie, qui, par essence, implique le capture d’une réalité à un instant T (fût-elle mise en scène).
Enfin, certaines polémiques récentes ont mis en lumière les limites et dangers de l’IA dans l’image. L’exemple d’Uber Eats a beaucoup fait réagir les réseaux sociaux fin 2023 : la plateforme de livraison a été surprise en train de remplacer les photos manquantes de plats par des illustrations générées automatiquement… avec des résultats grotesques. Pour un menu de pizzeria à New York, l’IA a pris le mot “pie” au pied de la lettre et affiché la photo d’une tourte sucrée, là où il s’agissait d’une pizza moitié BBQ, moitié Buffalo 🥧🤦♂️ . Elle a même inventé une fausse marque de sauce inexistante sur l’image, révélant son incapacité à représenter fidèlement le réel . Ce faux pas d’Uber Eats montre qu’en l’état, déléguer la photographie de produits à une IA sans contrôle humain peut nuire à la qualité et à la confiance des clients. En publicité, la marque de denim Levi’s a essuyé un retour de flamme après avoir annoncé qu’elle testerait des mannequins générés par IA pour « améliorer la diversité » de présentation de ses vêtements. Le public a critiqué ce choix perçu comme une solution de facilité au lieu d’engager de vrais mannequins de diverses origines. Levi’s a dû préciser que ces avatars ne seraient qu’un supplément et « ne remplaceront pas complètement les humains », l’objectif étant de montrer plus de tailles, couleurs de peau et âges différents en plus des shootings classiques . Là encore, l’expérience souligne l’importance de la perception : utiliser l’IA sans transparence ou sans respecter l’authenticité attendue peut entacher l’image d’une marque ou d’un projet.
En somme, la crainte principale des photographes face à l’IA générative est de voir leur savoir-faire et leur gagne-pain marginalisés par une technologie capable d’imiter la réalité à moindre coût. Ces peurs s’accompagnent de débats éthiques sur le respect des œuvres originales et la notion même de vérité photographique. Cependant, à côté des inquiétudes légitimes, des voix s’élèvent pour explorer les opportunités et évolutions que l’IA pourrait apporter au métier. Plutôt que de résister frontalement, certains choisissent d’adapter l’art photographique à ce nouvel outil, comme nous allons le voir.

Opportunités et évolutions pour les photographes à l’ère de l’IA
Malgré les préoccupations, l’IA générative offre aussi des perspectives inédites aux créateurs d’images. Pour de nombreux photographes et artistes visuels, ces outils sont envisagés non pas comme des remplaçants, mais comme de nouveaux alliés créatifs. En automatisant certaines tâches et en élargissant le champ des possibles, l’IA peut libérer du temps et stimuler l’inventivité.
Premièrement, l’IA s’intègre de plus en plus au flux de travail photographique. L’exemple d’Adobe Firefly en est l’illustration : intégré directement dans Photoshop, ce générateur permet aux photographes de créer ou prolonger un arrière-plan, d’ajouter des éléments visuels ou de retirer des objets indésirables de façon intuitive . Cette automatisation avancée de la retouche et du montage photo fait gagner un temps précieux lors de la réalisation d’images composites ou de visuels publicitaires . Au lieu de passer des heures à obtenir manuellement un montage réaliste, le photographe peut générer plusieurs variantes via l’IA, puis peaufiner le meilleur résultat. On observe ainsi un glissement du rôle : le photographe devient parfois directeur artistique, orchestrant l’IA comme un outil pour concrétiser sa vision. Ses compétences évoluent – moins de technique brute, plus de “prompting” (rédaction précise d’instructions pour l’IA) et de curation créative. Cette hybridation du savoir-faire a déjà cours dans d’autres domaines (par exemple les illustrateurs qui utilisent des IA pour des esquisses), et la photographie suit le même chemin pour qui sait en tirer parti.
Deuxièmement, l’IA générative peut aider les photographes à repousser les limites de leur imagination. Elle permet de visualiser instantanément des concepts qui seraient difficiles ou coûteux à réaliser dans la réalité. Certains photographes l’utilisent comme un outil de pré-production : ils génèrent des images pour tester des idées de cadrage, de décor ou d’éclairage avant un vrai shooting. D’autres s’en servent pour créer des œuvres d’art originales en combinant photo et IA. En 2023, Vogue Italie a proposé un numéro audacieux où la top-modèle Bella Hadid pose dans des décors surréalistes conçus par l’IA. Le photographe Carlijn Jacobs a d’abord réalisé des portraits de la star en studio, puis, avec l’aide d’un « AI artist », a généré des arrière-plans imaginaires via DALL-E. Il a fallu traduire en mots la vision créative pour “conseiller la machine”, une démarche expérimentale jalonnée de moments frustrants mais aussi de surprises selon Jacobs . Au final, le résultat est un mélange fascinant de créativité humaine et d’imagerie artificielle , ouvrant de nouvelles perspectives esthétiques. Ce type de co-création montre que l’IA peut être intégrée au processus photographique comme un outil artistique supplémentaire, à condition d’y investir du temps et de la méthode. Le photographe reste au centre de la démarche, c’est son œil qui guide la machine pour atteindre le rendu souhaité.

Du point de vue business model, l’IA générative pourrait également être transformée en atout par les professionnels avisés. Plutôt que de subir la concurrence d’images génériques produites par des IA, un photographe peut choisir de proposer lui-même des services incluant l’IA. Par exemple, une agence créative peut vendre à ses clients des visuels “hybrides” associant prises de vue réelles et améliorations IA pour obtenir des effets impossibles autrement. On voit déjà des studios commencer à se spécialiser dans la « promptographie » – la création d’images via prompt – en complément de la photographie classique, afin de répondre à des demandes spécifiques (un univers fantastique, un produit mis en scène dans un décor onirique, etc.). Le photographe de demain pourrait être aussi bien derrière l’objectif qu’au clavier à peaufiner une requête IA pour satisfaire son client. Sa valeur ajoutée résidera dans sa capacité à raconter une histoire visuelle cohérente, à garantir la qualité et l’authenticité du rendu, qu’il y ait usage d’IA ou non.
Par ailleurs, l’intégration de l’IA pousse à développer de nouvelles compétences. On parle beaucoup de « prompt engineering », c’est-à-dire l’art de formuler la bonne phrase pour obtenir de l’IA l’image souhaitée. Cette compétence, encore rare, peut devenir un avantage concurrentiel pour un photographe qui la maîtrise tôt. De même, comprendre les forces et faiblesses des différents modèles (Midjourney excelle en style X, DALL·E en Y, etc.) permettra de choisir le bon outil au bon moment. On peut aussi imaginer que les photographes s’allient avec des développeurs ou experts en IA pour créer des modèles personnalisés à partir de leur propre portfolio, afin de générer des images dans leur style unique. Ce serait là une façon pour le photographe de scaler sa vision artistique sans la diluer : entraîner une IA sur ses œuvres pour qu’elle produise des variantes qui portent sa “patte” reconnaissable. Bien sûr, cela soulève des enjeux de propriété et d’éthique (prêter son style à une machine), mais certains y verront une opportunité de diffusion plus large de leur art.
Enfin, il faut noter que le public et les clients commencent eux aussi à affiner leur regard vis-à-vis des images IA. Une partie du public valorise de plus en plus l’authenticité et le savoir-faire humain derrière une image. Ainsi, savoir qu’une photographie a été réalisée sans trucage IA pourrait devenir un argument de qualité, au même titre que le fait-main dans l’artisanat. On a vu émerger en 2023 des labels ou hashtags du type #NoAI sur les réseaux sociaux d’artistes, pour revendiquer une création 100% humaine. À l’inverse, d’autres clients assument pleinement l’usage de l’IA et y voient un gage de modernité et d’efficacité. Ils pourraient demander à ce qu’une campagne publicitaire utilise des visuels IA pour souligner son aspect innovant. Le photographe doit donc composer avec ces attentes variées. En élargissant sa palette (maîtriser la photo classique, la retouche avancée, et pourquoi pas la génération IA), il pourra mieux s’adapter aux demandes et conserver sa pertinence sur le marché. Comme le résume crûment un expert du microstock : « l’AI- généré est là pour rester, il faut s’adapter ou mourir ! » . Sans aller jusqu’à cette extrémité, on comprend qu’une évolution du métier est inéluctable. Mais plutôt que la disparition du photographe, c’est une transformation du rôle qui se dessine : moins exécutant technique, plus auteur-créateur accompagné par l’IA.

Comparatif objectif : IA générative vs Photographie traditionnelle
Il est tentant d’opposer frontalement l’IA et la photographie humaine. En réalité, chacune a ses forces et ses faiblesses, et leur pertinence dépend du contexte d’utilisation. Voici un comparatif IA vs photographie sur les points clés :
- Créativité et imagination : L’IA générative peut produire des images de pure fantaisie, mêler des éléments sans contrainte de réalité (par exemple un paysage imaginaire sur Mars, un animal fantastique, etc.). Elle offre une diversité visuelle infinie à partir de simples mots, ce qui stimule l’innovation artistique. En revanche, elle se base sur ce qu’on lui a appris : elle n’« imagine » qu’en remixant des références existantes. Le photographe humain, lui, crée en s’inspirant du réel et de son vécu, mais peut aussi imaginer des mises en scène originales. Sa créativité réside dans sa vision, son coup d’œil, l’émotion qu’il capture ou provoque. Il est limité par les lois physiques et ce qui existe réellement devant son objectif, mais l’histoire de l’art montre que ces limites ont engendré d’infinies innovations. Verdict : l’IA excelle à créer des visuels hors du commun, la photographie excelle à sublimer le réel et transmettre une émotion authentique.
- Rapidité et coût de production : Générer une image par IA est souvent très rapide (quelques secondes à quelques minutes) et peu coûteux une fois qu’on a accès à l’outil (abonnement mensuel ou crédits à la demande). Pour des visuels simples, une entreprise peut économiser le temps et l’argent d’un shooting (location de matériel, déplacement, rémunération d’une équipe) en optant pour l’IA. Comme le notait Nikon, « des millions de personnes créent des images incroyables en entrant juste quelques mots clés » – un processus irrésistiblement efficace . En comparaison, organiser une séance photo professionnelle prend du temps (repérages, prises de vue, post-traitement) et le coût peut être élevé. Cependant, la rapidité de l’IA peut être trompeuse : pour obtenir l’image parfaite, il faut parfois de nombreux essais de prompt, des retouches manuelles supplémentaires, et un œil expert pour valider le résultat. De plus, certaines images requièrent absolument un passage par la case photographie (événement en direct, portrait officiel, etc.) et l’IA ne peut s’y substituer. Verdict : Pour des visuels génériques ou créatifs, l’IA l’emporte en vitesse et en coût marginal. Pour des images nécessitant un contexte réel ou une garantie de fidélité, la photographie justifie son investissement.
- Qualité et réalisme : Longtemps, les images générées par IA trahissaient des imperfections (détails anatomiques faux, texte illisible dans l’image, artefacts bizarres). En 2023, la qualité s’est considérablement améliorée, au point que certains rendus IA sont indiscernables de photos . DALL-E 3 ou Midjourney v5 peuvent par exemple reproduire des textures, des éclairages et des visages très crédibles. Néanmoins, l’IA a encore du mal avec certains éléments (les mains et doigts humains, la cohérence exacte d’un texte visuel, etc.), même si elle progresse vite. De plus, elle peut manquer de cohérence d’ensemble : elle génère un instant figé mais sans contexte avant/après, sans histoire vraie derrière l’image. À l’inverse, une photographie prise par un professionnel bénéficie d’une qualité maîtrisée à la source (objectifs haut de gamme, réglages précis) et d’un réalisme garanti si elle n’est pas retouchée. On sait d’où vient la lumière, on sent la vie dans les sujets photographiés. La photo peut toutefois être limitée par les conditions de prise de vue (lumière disponible, météo, etc.), là où l’IA s’affranchit de ces contraintes. Verdict : Sur le plan purement visuel, l’écart se resserre chaque mois – l’IA peut atteindre un photoréalisme bluffant, mais la photographie reste la référence de la “vraie” image impeccable, notamment pour des sujets humains où chaque détail compte.
- Authenticité, émotion et confiance : Une photographie capture un moment réel qui a existé, même fugacement. Cette connexion au réel lui confère une charge émotionnelle et une crédibilité incomparables, surtout pour des sujets comme le photojournalisme, les souvenirs de famille, les documents historiques. Voir la vraie expression d’une personne, un paysage tel qu’il était ce jour-là, cela touche d’une manière que l’IA ne peut reproduire, car on sait intérieurement qu’il y a eu un témoin humain derrière l’objectif. À l’opposé, une image IA est par nature une construction fictive : elle peut émouvoir par sa beauté ou son esthétique, mais elle ne témoigne de rien de vécu. Dans certains usages (par exemple la publicité ou l’art conceptuel), cela n’a pas d’importance que l’image soit fictionnelle. En revanche, pour la presse, la science, la justice, ou tout domaine où l’image est une preuve, la photographie authentique garde une place irremplaçable. Par ailleurs, la confiance du public peut être entamée s’il y a ambiguïté : une photo qui s’avérerait être générée provoquerait un sentiment de tromperie. D’où l’importance émergente de signaler les contenus créés par IA. Verdict : Pour l’émotion et la confiance, la photographie réelle domine – une image IA devra toujours préciser qu’elle est “artificielle” et ne pourra pas servir de preuve du réel.
- Éthique et droits : La photographie traditionnelle, bien qu’elle puisse soulever des questions (droit à l’image des sujets, mise en scène de la réalité, retouches abusives), s’inscrit dans un cadre juridique clair et une déontologie établie. Un photographe est auteur de ses clichés et en détient les droits (sauf contrat contraire), il doit obtenir les autorisations nécessaires des personnes photographiées, etc. L’IA générative, elle, navigue dans un flou actuel : qui est l’auteur légal d’une image créée par IA – la personne qui a tapé le prompt, l’outil lui-même, ou les millions d’artistes dont l’IA a appris en « digérant » leurs œuvres ? De plus, les biais et dérives possibles de l’IA posent question : elle peut reproduire des stéréotypes présents dans ses données d’entraînement, ou servir à créer de fausses images préjudiciables (deepfakes, propagande). Les photographes humains, en tant que professionnels, sont censés adhérer à une certaine éthique (ne pas manipuler une photo de presse, par ex.). L’IA, elle, n’a pas de conscience et exécutera n’importe quelle demande, y compris potentiellement nuisible, tant que l’utilisateur y a accès. Cela oblige la société à mettre en place des garde-fous (filtres dans les logiciels, lois, transparence sur l’origine des images). Verdict : La photographie opère dans un cadre plus sain et contrôlé du point de vue éthique, tandis que l’IA soulève encore de nombreux défis éthiques et juridiques à résoudre pour être pleinement acceptée.
En résumé, IA et photographie traditionnelle excellent chacune dans des domaines différents. L’IA brille par son inventivité illimitée, sa rapidité et son coût réduit pour produire des visuels percutants, là où la photographie excelle par son authenticité, sa capacité à émouvoir par le réel et son ancrage légal et éthique solide. L’une ne remplace pas complètement l’autre : elles se complètent et cohabitent de plus en plus, en fonction des besoins et des contextes. C’est pourquoi l’avenir de l’image se dessine probablement dans la complémentarité intelligente de ces deux approches.
Vers des pratiques hybrides : l’alliage de l’IA et de la photographie
Plutôt que de dresser un mur étanche entre IA et photographie, beaucoup d’acteurs explorent désormais la voie hybride, où les deux mediums s’enrichissent mutuellement. Cette cohabitation créative se manifeste déjà à travers différentes pratiques innovantes.
D’une part, les photographes intègrent des éléments générés par IA dans leurs œuvres. Nous avons évoqué le cas de Vogue Italia avec Bella Hadid, où le décor est un produit de DALL-E. De même, le photographe français Benoît Carré(alias Obvious) a fait parler de lui en combinant portraits photographiques et ornementations obtenues via IA, brouillant la frontière entre le réel et l’imaginaire. Ces démarches artistiques s’apparentent à du mixed media numérique, où l’image finale résulte d’un savant montage de prises de vue et de renders artificiels. L’intérêt est de créer des visuels qu’aucune des deux techniques n’aurait pu accomplir seule : un photomontage unique en son genre, où la patte humaine reste perceptible dans la composition et la direction artistique, tandis que la touche IA apporte une part d’onirisme ou d’impossible. Le résultat peut être intrigant et ouvrir de nouvelles esthétiques. Bien sûr, l’artiste se doit généralement de préciser la nature hybride de l’œuvre (par honnêteté envers le public), mais lorsque c’est assumé, cela peut être très bien reçu comme une forme d’art numérique contemporaine.
D’autre part, les outils technologiques évoluent pour faciliter cette union entre photo et IA. On voit apparaître des appareils photo et logiciels intégrant nativement l’IA. Par exemple, la dernière version de Photoshop permet de remplir intelligemment les bords d’une photo pour l’étendre (fonction de generative fill), créant ainsi un arrière-plan plausible à partir de l’existant. Des prototypes de caméras “augmentées” par l’IA ont même été présentés : la Paragraphica, un concept d’appareil photo sans lentille, génère une image à partir de la localisation GPS et de données descriptives de l’endroit à photographier. Si ces gadgets sont encore expérimentaux, ils témoignent de la réflexion en cours sur de nouvelles formes de capture d’image mêlant capteurs et génération IA. Plus concrètement, les fabricants d’appareils traditionnels s’allient à des initiatives pour garantir l’authenticité des prises de vue. Leica et Canon/Nikon travaillent avec Adobe au sein de la Content Authenticity Initiative (CAI) pour intégrer des métadonnées inviolables d’authenticitédans chaque photo à la prise de vue . Le standard C2PA, embarqué sur certains boîtiers depuis 2023, permettra de certifier qu’une image est bien une photo originale non altérée. Ce type de solution, un peu comme un “watermark” numérique invisible, est une réponse directe à l’essor des images IA : il s’agit de redonner confiance en garantissant l’origine des clichés. On peut imaginer qu’à terme, chaque photo de presse ou documentaire portera ce sceau d’authenticité, pendant que les créations IA arboreront un label indiquant leur nature. Photographie et IA coexisteront ainsi en toute transparence, chacune trouvant sa place.
Les agences créatives adoptent également une approche hybride dans leurs campagnes. Plutôt que de choisir 100% photo ou 100% IA, elles mixent les deux pour tirer parti des avantages de chacune. Par exemple, une campagne automobile pourra combiner de vraies photos de voiture (fidèles au modèle) avec un paysage généré par IA pour créer un univers visuel inédit. Le photographe travaille main dans la main avec un designer IA pour s’assurer que l’éclairage de la voiture concorde avec le décor artificiel. Ce type de workflow collaboratif est appelé à se développer, faisant émerger de nouveaux métiers comme « concepteur d’images IA » au sein des équipes de production visuelle. Déjà, de grandes agences de pub internationales ont recruté des spécialistes de Midjourney ou Stable Diffusion pour enrichir leurs propositions créatives. Là encore, cela n’élimine pas le photographe, mais l’incite à dialoguer avec ces nouveaux experts.
Du côté des clients (annonceurs, éditeurs, etc.), on assiste à une maturité grandissante : ils apprennent à définir quand l’IA sert leur propos et quand la photographie traditionnelle est incontournable. Un éditeur de magazine saura qu’un portrait de personnalité publique doit être authentique (on organise alors une séance avec un photographe), mais qu’une illustration pour un article de fiction ou conceptuel pourrait être réalisée par IA sans problème. Un e-commerçant utilisera volontiers l’IA pour diversifier les profils de mannequins sur son site (comme Levi’s a voulu le faire) ou montrer un objet décliné dans 50 styles différents, mais pour présenter le produit réel, il continuera de faire appel à un photographe afin d’avoir une image fidèle et rassurante pour l’acheteur. Ce jeu d’équilibre entre IA et photo devient une composante de la stratégie visuelle. Les photographes qui l’ont compris peuvent se positionner non seulement comme prestataires d’images, mais comme conseillers visuels aidant le client à naviguer entre ces deux voies. Plutôt que de subir la concurrence de l’IA, intégrer celle-ci dans son offre peut devenir un avantage compétitif.
En définitive, les usages hybrides montrent une voie positive : celle d’une cohabitation créative. L’IA et la photographie, loin de s’annihiler, peuvent s’entrelacer pour donner naissance à de nouvelles formes d’art visuel et de communication. Comme souvent avec les technologies disruptives, après la phase de choc et de peur vient la phase d’apprivoisement. Nous sommes en plein dans cette transition, où photographes et IA apprennent à travailler de concert. Reste à dessiner les règles du jeu équitables (protéger les droits des uns, informer le public, encourager les bonnes pratiques) pour que cette alliance se fasse au bénéfice de tous.

Conclusion – L’avenir de la photographie selon ChatGPT
En tant qu’IA conversationnelle témoin de ces évolutions, ChatGPT porte un regard optimiste sur l’avenir de la photographie à l’ère de l’intelligence artificielle. L’histoire nous enseigne que chaque nouvelle technologie visuelle – de la chambre noire à Photoshop – a suscité des craintes avant de trouver sa place et d’élargir le champ de la créativité humaine. La photographie ne sera pas “tuée” par l’IA générative, pas plus que la peinture n’a été tuée par la photographie en son temps. Cependant, il est indéniable qu’elle va se transformer en profondeur.
Dans les années à venir, on peut s’attendre à ce que le métier de photographe évolue vers plus de polyvalence. Les photographes qui embrasseront l’IA comme outil pourront enrichir leur palette d’expression et gagner en productivité, là où d’autres choisiront de se spécialiser dans la pure photographie artisanale, jouant la carte de l’authenticité exclusive. Ces deux approches resteront valables et trouveront chacune leur public. L’important, du point de vue de ChatGPT, est que la valeur artistique et narrative reste au centre : une image, qu’elle soit capturée ou générée, doit raconter quelque chose, provoquer une émotion, transmettre un message. L’IA pourra assister le photographe dans cette mission, mais elle ne pourra pas remplacer la vision humaine qui donne du sens à l’image.
Il est probable également que de nouvelles régulations et conventions sociales apparaissent pour accompagner ce duo photographie-IA. ChatGPT anticipe par exemple la généralisation de balises de transparence – un peu comme les mentions “photo retouchée” qu’on voit déjà dans certains magazines. Le public s’habituera à consommer des images en sachant distinguer leur nature, et appréciera tantôt la magie brute du réel, tantôt la créativité sans limite du virtuel. Les concours de photographie apprendront à créer des catégories dédiées ou des labels garantissant l’intégrité d’une œuvre. Le droit d’auteur évoluera pour mieux protéger les créateurs dont les œuvres entraînent les IA, afin de maintenir un écosystème juste et durable.
Du point de vue de la clientèle et du marché, ChatGPT entrevoit un paysage enrichi : davantage d’images disponibles, personnalisables à l’envi, pour répondre aux besoins croissants de contenu visuel à l’ère numérique. La photographie traditionnelle deviendra peut-être plus rare dans certains secteurs (par exemple la banque d’images génériques), mais paradoxalement plus précieuse là où elle subsistera, car elle apportera ce supplément d’âme et de réel que l’IA ne peut fournir. On peut imaginer que dans quelques années, mettre en avant qu’une campagne publicitaire n’a utilisé aucuneimage générative devienne un argument haut de gamme, tout comme d’autres campagnes revendiqueront fièrement leur esthétique IA avant-gardiste. Le marché s’élargira pour inclure ces deux sensibilités.
En conclusion, l’avenir de la photographie à l’ère de l’IA s’annonce comme un dialogue continu entre l’homme et la machine. Plutôt qu’une opposition stérile, c’est une relation de complémentarité et de co-création qui se profile. La photographie, art de lumière inventé il y a près de deux siècles, a toujours su intégrer les avancées techniques sans perdre son essence : celle de capturer un regard unique sur le monde. L’IA générative, utilisée avec discernement, peut devenir une prolongation de cette essence, un nouvel objectif virtuel braqué sur l’infini des possibles. Le défi sera de garder l’éthique et l’authenticité au cœur du processus, pour que chaque image – qu’elle sorte d’un capteur ou d’un algorithme – continue de nous émerveiller en racontant une histoire humaine. Et à ce titre, les photographes ont plus que jamais un rôle à jouer : celui de gardiens de la réalité et d’explorateurs du futur, simultanément. Le futur de la photographie ne se fera pas contre l’IA, mais bien avec elle, dans un équilibre à inventer jour après jour, projet après projet. C’est un horizon stimulant, où la créativité n’aura pour limite que celle que nous fixons à nos outils. En route vers l’image de demain !
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📚 Sources et références
- Eldagsen, B. – AI image wins photo contest – but artist refuses prize, BBC News, avril 2023.👉 bbc.com/news/world-europe-65299649
- Nikon Peru & Circus Grey – The Natural Intelligence campaign (via Ads of the World), 2023.👉 adsoftheworld.com/campaigns/natural-intelligence
- Adobe – Introducing Generative Fill in Photoshop powered by Firefly, mai 2023.👉 adobe.com/products/photoshop/generative-fill.html
- PetaPixel – AI is already replacing photographers in some countries, mai 2023.👉 petapixel.com/2023/05/24/ai-is-replacing-photographers
- Dazed Digital – Vogue Italia and Bella Hadid use AI to reimagine fashion photography, juin 2023.👉 dazeddigital.com
- Getty Images vs Stability AI – Procès en cours sur l’usage d’images protégées, Reuters, janvier 2023.👉 reuters.com/legal/getty-images-sues-ai
- The Verge – How Midjourney became the internet’s favorite AI image maker, août 2023.👉 theverge.com
- Fstoppers – Photographers still have the edge over AI — for now, octobre 2023.👉 fstoppers.com
- The Guardian – Uber Eats uses AI-generated images for menus — and the results are disturbing, novembre 2023.👉 theguardian.com/technology/ai-generated-food-images
- Wired – Adobe, Nikon, Canon and the CAI work to certify real photos, février 2024.👉 wired.com/story/adobe-cai-real-photo-initiative
- Red Line Project – What is Generative AI’s Influence on Photography?, mars 2025.👉 redlineproject.news
- ProEDU – How AI is revolutionizing traditional photography workflows, janvier 2024.👉 proedu.com/blogs/photography-fundamentals
- Aesthetics of Photography – Midjourney and the aesthetics of artificial photography, 2024.👉 aestheticsofphotography.com